Pyramide

A la lisière, l’aube fraîche me décide
Maintenant, je suis comme apatride
Mon regard et l’horizon coïncident

Même si on a vu grand à l’origine
On est des bâtisseurs de ruines
Bien sûr qu’on mérite ce mépris
On a oublié, c’était un paradis

A la lisière, l’aube fraîche et lucide
C’est la fin d’un cycle, sa pyramide
Le cheval a déjà piétiné sa bride

Principe

Pourtant c’est mon meilleur rôle
Le son de la trompette me frôle
Même ce noir et blanc m’enveloppe
Ils disent Fatale, danger, salope
Parlent-ils d’elle ou de la vie ?
Feraient mieux de parler de la pluie

Vous voyez cette réalité
Je voudrais bien la laisser
Mais quelle mélodie
Trouver sur un orgue de Barbarie ?

Des odeurs dans les narines
Une chaleur, le tableau s’anime
C.J. Walker, private eye
Holster, 45, Brooklyn dry
Filatures, crimes et délits
Histoires qui sentent le roussi

Vous voyez cette réalité
Je voudrais bien la laisser
Mais quelle mélodie
Trouver sur un orgue de Barbarie ?

Dans mes bras elle dit
Mais tout est pourri
Tout est terni
Mais quelle mélodie …
Parle-t-elle de moi, de nos vies ?

Le mouvement du ciseau
Met le monde en morceaux
Vous voyez cette réalité
Je veux bien la laisser

Mais quelle mélodie
Trouver sur un orgue de Barbarie ?
Sur un orgue de Barbarie ?

Sur le disque de Nick Cave

La première des raisons pour lesquelles il fut surpris de la voir débarquer chez lui quelques jours après avoir fait sa connaissance, c’était qu’à aucun moment il ne se souvenait avoir dit son adresse.
Je te dérange ?
Non, bien sûr que non, dit-il, tandis que lui revenait progressivement les circonstances de leur première rencontre. Vas-y entre. Il ouvrit la porte en grand et s’écarta pour la laisser passer.
Il proposa un café et ils s’assirent sur le canapé, allumant rapidement chacun une cigarette.
Qu’est-ce que tu faisais ?
Rien.
Rien ? Elle sourit. Et ce soir, qu’est-ce que tu fais ?
Je bosse.
Ah. Ah oui, qu’est-ce que tu fais déjà ?
Je travaille à l’usine.
Oui, c’est vrai, tu l’as dit. Elle hocha la tête. Où ça, je veux dire dans quelle usine ?
Une usine de cartons, en zone Sud. En intérim.
Okay.
Et toi ?
Je suis en term.
Oui. Non, je voulais dire qu’est-ce que tu fais ce soir ?
Je sais pas. Je pensais aller en ville, dans un bar, tu vois …
C’était dans un bar qu’il l’avait rencontré. Elle y accompagnait sa copine Julie.
La deuxième raison était que ce jour-là, on ne pouvait dire qu’il avait été brillant au point que l’on souhaite à tout prix le revoir.
Vincent, un ami avec qui ils passaient l’après-midi Marco et lui, ne cachant pas – ni à eux, ni à elle – les vues qu’il avait sur Julie, il lui avait téléphoné de les rejoindre. Il eût alors en face de lui quatre étudiants, elle au lycée, Marco et Julie à la fac et Vincent en IUT. Ses classeurs de cours n’étaient abandonnés que depuis peu, pourtant il se sentit rapidement exclu de leurs conversations. Il se disait que cette situation lui convenait mais le fait qu’il but plus que de raison pouvait être la preuve du contraire.
Il n’est pas trop fort ? fit-il après qu’elle eût portée la tasse à ses lèvres.
Non, ça va. Elle se plia en deux et reposa son café sur la table basse.
Ils se mirent à tirer tous les deux sur leurs cigarettes en silence sans se regarder. Au bout d’un moment, elle désigna des yeux le lecteur sous la télé. Qu’est-ce que t’écoutes ?
Nick Cave. Tu connais ?
Un peu. J’ai déjà entendu.
Il se pencha vers le cendrier et écrasa sa cigarette, à deux doigts de toucher au passage son genou, puis il se leva d’un bond. Il appuya sur stop puis sur play. Attendit pour revenir s’asseoir les premières notes au piano de Into my arms.
La dernière des raisons était qu’il avait cru saisir qu’elle sortait déjà avec quelqu’un.
Il apprit plus tard de sa bouche que son histoire avec ce quelq’un n’avait en fait durée qu’une soirée où les deux n’avaient pas finis dans leur état normal. Ce jour-là, sur le disque de Nick Cave, alors qu’ils s’embrassèrent et s’échauffèrent jusqu’à ce qu’il fut obligé de partir pour son travail, il n’en savait rien. Jusqu’à ce qu’elle le lui dise, il ne posa aucune question. D’ailleurs, en règle générale, il ne s’en posait pas. Il semblait ne pas y avoir grand chose en lui.
Leur relation débuta réellement le weekend suivant. Elle arriva à son appartement le samedi vers quinze heures. Ils reprirent là où ils s’étaient arrêtés.

Rien à saisir ?

Sans voiture sans permis
Sans travail sans pardon
Sans vergogne il envoie sa moitié au charbon
Sans oublier quand même de lui faire la leçon
Ses oreilles sifflent mais ce bourdon n’est qu’une expression

Rien à jaillir
Rien à polir
Rien à saisir ?

Sans allant sans défi
Sans voie sans poésie
Et si je souhaite du courage à qui me jugera
Moi ce miroir me dit un peu ce que je suis
Nous avons eu tous nos jougs nous avons eu tous nos choix

Rien à bouillir
Rien à venir
Rien à redire ?

( Soldat Soldat mort ?
Soldat Soldat mort ?
Soldat ? )

Issu de cette histoire

C’est arrivé au bord du précipice
J’ai vu grouiller les immondices
C’est attendant au bord du sacrifice
Je cherchais des vertus aux vices

Le fin fond de cette histoire
Le fin fond de cette histoire

C’est arrivé au bord de l’adversité
Il s’est révélé que je m’étais relevé
C’est attendant au bord de l’obscurité
Qu’une seule étincelle m’a soufflé

Le fin fond de cette histoire
Le fin fond de cette histoire

Assis sur une chaise, ça me va bien
J’attise parfois les braises, ça n’va pas loin

Du fin fond de cette histoire
Je suis issu
Je suis issu
Je suis issu
Je suis issu d’échappatoires

Néons et enseignes

Néons et enseignes, plus que jamais leur règne
Avec l’inconnue, parce qu’elle l’est redevenue
Mais regarde là-haut, tête en l’air oiseaux
Regarde à défaut

Néons et enseignes, et tout ça m’entraîne
Rues et trottoirs, c’est comme un top départ
Je vais aller feindre, jouer de la musique
Les rejoindre, sur leur fil électrique

Ce n’est que le sens
J’ai encore l’impatience
Ils sont tous à me dévisager
Ils n’ont jamais vu quelqu’un en train de se tromper ?

Néons et enseignes, alors ma triste dégaine
Ne sera sans doute plus là dans un mois une semaine
Elle aura dégoter où aller jouer de la musique
Une scène éclectique

Néons et enseignes, et tout ça m’entraîne
Rues et trottoirs, c’est comme un top départ
Je vais aller peindre, jouer de la musique
Une cène agnostique

Ce n’est que le sens
Je refuse l’évidence
Ce n’est que le sens
Je me jette et je me recommence

Néons et enseignes

Symbole

Après coup, il se rappela un après-midi bien précis et lui octroya le rang de symbole définitif.
Le temps était clément et elle l’avait entraîné dans une course aux magasins de fringues.
Il ne se souvenait pas quand se situait cette journée précisément, mais il pouvait dire qu’il était complètement perdu. C’était facile de l’affirmer, ce fut son état tout le temps qu’avait duré leur relation. Passant chez elle beaucoup plus que l’inverse, il se faisait l’effet pitoyable de grappiller le plus de temps possible en sa compagnie. Mais même dans ces moments, quand il était avec elle, à ses côtés, il se sentait largué. C’était une image rebattue bien sûr, mais c’était comme s’il y avait quelque voile transparent entre eux, une fine cloison même, avec elle si libre et vivante d’un côté et lui si statique et emprunté de l’autre. Une statue molle, pensait-il quand il en souriait.
Et cet après-midi là pareillement, même s’il éprouvait une grande fierté à se promener en ville avec elle, ça ne signifiait pas pour autant qu’il se sentait à l’aise. C’est ainsi que dans la dernière boutique, celle où en fin de compte elle trouva son bonheur, il se mit inconsciemment à lui laisser le champ libre. Il la perdit, partit à sa recherche quelques instants à travers les rayons et la retrouva devant un portant de chemisiers.
Lorsqu’elle le vit devant elle, un grand sourire illumina son visage. Et elle recommença à faire défiler les vêtements, écartant la manche de l’un d’eux. Une pensée lui vînt et il rit.
Quoi ? fit-elle en le regardant.
Rien.
Comment tu le trouves ?
Il m’a l’air bien.
Mouais.
Elle lâcha la manche, celle-ci retomba vide le long du corps vide. Deux, trois minutes plus tard, son choix se portait sur un autre, un qu’elle avait déjà dû examiner. Elle prit la direction des cabines d’essayage. Il la suivit, traînant le pas. Au bout d’un moment, elle ouvrit le rideau afin qu’il puisse donner un avis favorable.

Ou bien rien de tout ça

Reste à voir
Reste à voir comme elle m’emmènera
Reste à voir
La place que prendront toutes nos joies

Mon endroit de connivence avec ton envers
Et ton paradis qui converge vers mon enfer

Maintenant que je sais qu’elle existe
Reste à voir comme elle m’emmènera
Une gendarme, une voleuse, une complotiste
Peut-être plus ou moins ou bien rien de tout ça

Elle s’appelle Gaëlle
Elle s’appelle Gaëlle et mon cœur chat
Elle s’appelle Gaëlle
Et mon cœur chat et mon cœur rat chaque fois

Mes regrets dans la balance de tes revers
Et ton paradis qui converge vers mon enfer

Maintenant que je sais qu’elle existe
Reste à voir comme elle m’emmènera
Une tradeuse, une hackeuse, une fleuriste
Juste l’esquisse qui va s’effacer sous mes doigts

Le château

Si on avait pris la décision d’y aller, il fallait, de l’arrière de la maison, prendre le sentier qui fendait en diagonale le parc à moutons divisé en parcelles. Cinq minutes et on tombait, au bout de celui-ci, à l’orée d’un bois où entre deux racines d’un chêne, attendait un vieux ballon.

Nicolas avait quelques fois questionné ses parents. Mais il abandonnait rapidement. Ils ne lui fournissaient que peu de renseignements et aucun d’eux n’était chevaleresque.
Il appartenait à l’agriculteur dont la ferme le jouxtait. Aux yeux de Nicolas, ça l’entourait d’un certain prestige : il n’était pas un simple paysan, comme son père et tous les autres alentours, il était propriétaire d’un château ! A bien l’observer, il lui trouvait quelques manières de châtelain et puis même, sa ferme n’avait aucune commune mesure avec celle de ses parents. Il avait beaucoup plus de vaches qu’eux mais encore d’immenses porcheries que le car scolaire longeait matin et soir. Une réflexion de sa mère confirma. Dans l’ancien temps, la mère de cet agriculteur sortait en voiture tirée par deux chevaux. Elle arborait un air supérieur, dont son fils avait d’ailleurs un peu hérité, lorsqu’elle croisait ceux qu’elle considérait comme le petit peuple.

Après quelques instants d’hésitation, il escalada les barbelés et passa dans le champ. Il se mit à flâner entre la rangée de troncs sans vie d’avoir servis contre les démangeaisons des bovins. Justement, il vérifia encore une fois que le champ était bien libre de vaches. Il traversa rapidement jusqu’à la clôture du bas et la franchit aussitôt.
Jusque là, on pouvait encore dire qu’il n’avait rien fait. Mais un pas de plus et ce ne serait plus vrai. Face à lui, s’étendait un bois fourni qui descendait à pic jusqu’à la pelouse du château.
Son premier pas le fit glisser jusqu’à un tronc, refuge qui lui permit de calculer un chemin. Mais quand il se lança, il fut obligé d’improviser un zig-zag en fonction des différents obstacles, troncs, arbustes, branches tombées au sol, ronces et finalement il atterrit en bas.

Nicolas avait l’arrière de la bâtisse sous les yeux. Il resta longtemps immobile à l’endroit même où sa descente l’avait mené, les pieds enfoncés dans un tapis d’aiguilles de sapins.
Il se doutait bien qu’il ne découvrirait pas un château de cinéma, ni rien non plus de la Tour de Bridiers, seul vestige encore debout du château du même nom. Mais ce qu’il voyait était un bâtiment, certes grand, mais tout en longueur, posé triste au milieu d’un parc. Il comprit rapidement qu’il ne pourrait rien voir de l’intérieur de ce côté-ci. Les seules fenêtres étaient beaucoup trop élevées pour qu’un homme puisse les atteindre, a fortiori un enfant. Il avait compris aussi au premier regard qu’il ne pourrait rien en faire. Cela ne deviendrait jamais un de ses terrains de jeu.
Il se mit à faire les cent pas, jetant un œil sur le devant. Là-bas, derrière la haie, des voitures passaient par intermittence. Leurs conducteurs, leurs passagers, comme il le faisait souvent dans le car scolaire pouvaient tourner la tête et par une trouée, espérer voir un peu du parc et de la façade. Son envie fut plus grande que son appréhension.
Il ne courra pas, il marcha normalement. Il gravit les quelques marches humides pour parvenir sur l’imposant perron, qu’il traversa les yeux rivés sur la grande baie vitrée qui dévoilait une salle vide. Après deux ou trois allers-retours, il fit une pause derrière un des bosquets qui encadraient la façade.
Une immense tristesse s’était emparée de lui. Bien sûr, il y avait la déception, mais la tristesse, d’où venait-elle ? Venait-elle des fantômes ? Parce qu’il imaginait une famille aristocrate attablée par un somptueux après-midi, devisant de choses et d’autres, de l’état de leur propriété ou du pays comme il allait, ou de tel métayer, que la maîtresse de maison considérait comme une brute épaisse mais que le maître défendait comme un travailleur courageux, courage qu’ils accordaient tous les deux à la femme du métayer. Nicolas ne savait pas. Peut-être avait-il lu cela dans quelque livre et le déposait-il à l’intérieur de cette grande pièce vide, la seule qu’il pût voir.
Et il n’y avait rien d’autre. Il aurait beau arpenter en long et en large ce perron, coller son visage au carreau de cette baie vitrée, il ne verrait, n’apprendrait rien de plus. Il revint sur l’arrière du bâtiment.

Une écurie n’avait, en premier lieu pas retenue son attention, il y pénétra. On aurait dit que, quels qu’aient pu être les animaux, moutons, chèvres, que l’on abritait là, ils venaient juste d’en sortir. Il y avait encore une fine couche de foin, les auges étaient vides mais les chaînes traînaient par terre, entortillées. Cette écurie devait faire la moitié de la surface de la bergerie, pourtant petite, de ses parents.
Les premières gouttes d’une nouvelle averse se mirent à tomber. Il retourna aux sapins et chercha le meilleur endroit pour attaquer sa remontée.

Memento

Ce claquement c’était lui, une portière, une porte
J’ai fait comme si de rien n’était, fait en sorte
Je t’ai dévoré dans la soie et le satin
Pour la faim d’hier et celle de demain
Je t’ai rencontré juste avant la fin
Juste avant la venue de mon assassin
Memento, mori vivere, memento

Je le savais, on me l’avait dit, qu’il me cherchait
Mais j’ai fait en sorte, fait comme si de rien n’était
Je suis tombé sur la chute de tes reins
Mes larmes, les tiennes, le même chemin
Je t’ai rencontré juste avant la fin
Juste avant la venue de mon assassin
Memento, mori vivere, memento

Non, espérer une erreur serait vain
L’arc et sa flèche sont souverains

Memento, mori vivere, memento
Memento, mori vivere, memento

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